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« Ce n’est pas tant ce que vous donnez mais la manière dont vous le donnez »

J’ai été membre du Conseil d’administration pendant sept ans, et je l’ai présidé pendant les trois dernières années. Cependant, mon engagement dans le Projet Sphère remonte à son tout début. En 1997, je travaillais au Bangladesh et j’ai examiné les premières propositions du Projet avec l’organisation pour laquelle je travaillais à l’époque. J’ai ensuite pris part au travail du groupe d’agences qui pilotait le Projet à la fin des années 90 et au début des années 2000.

Je dirais que c’est l’approche fondée sur les droits. C’est-à-dire cette idée que les gens ont le droit d’être aidés, et que cette aide doit être apportée et tenir compte de la dignité des personnes touchées par une catastrophe. Le droit de vivre dans la dignité est, pour moi, un principe fondamental, ce qui a pour conséquence qu’il faut porter assistance d’une manière efficace et responsable.

On peut regretter que le second élément, à savoir le comment, c’est-à-dire les standards minimums, prenne quelquefois le pas sur ce principe fondamental. Nous tous, utilisateurs du manuel Sphère, devrions tenir compte en priorité du droit à l’assistance, de la dignité de celles et ceux qui la reçoivent, ainsi que des principes de protection ‒ que nous avons incorporés dans l’édition 2011 du manuel.

Eh bien, là aussi, il s’agit du principe de dignité. Des études ont montré que ce qui fait la différence n’est pas tant ce que vous donnez mais la manière dont vous le donnez. Dès lors, ce qui est crucial, c’est le cadre dans lequel ceux qui donnent et ceux qui reçoivent travaillent ensemble, et la manière dont ils le font. Si nous pouvons réaliser cet élément essentiel de l’approche Sphère, je pense que nous pouvons avoir un impact réel sur la relation entre ceux qui sont touchés par une catastrophe et ceux qui leur portent assistance ou s’en occupent de toute autre manière.

Bien entendu, il faut à l’évidence certaines garanties ‒ relatives aux standards minimums énoncés dans le manuel Sphère – que, si l’on travaille avec des organisations censées promouvoir Sphère, on puisse attendre que les services fournis, qu’il s’agisse d’abris ou d’eau et d’assainissement, soient de qualité.

Ainsi, les activités mises en œuvre de manière professionnelle auront des résultats de meilleure qualité. Toutefois, les études d’impact du Projet Sphère ont été jusqu’ici peu nombreuses et il conviendra donc de travailler à cet égard dans les années qui viennent.

Je me souviens particulièrement d’une séance de présentation des standards Sphère à l’intention de représentants des universités et du gouvernement à Mumbai, il y a environ cinq ans. Il y avait alors eu une discussion très serrée bien que très constructive sur le rôle des ONG, des agences gouvernementales et de la communauté universitaire. Que les standards minimums applicables à l’action humanitaire soient pris en compte avec tant de sérieux dans un pays comme l’Inde m’a véritablement ouvert les yeux. Bien entendu, ça n’est pas arrivé par hasard. Lors du lancement de l’édition 2011 du manuel, Sphere India, qui est membre du Conseil d’administration Sphère, a montré une nouvelle fois que l’intérêt et la volonté de le faire sien sont bien là.

Un autre événement touchant s’est produit après le tremblement de terre de 2010 en Haïti. Je participais à une réunion dans un camp assez important, quand brusquement une jeune travailleuse humanitaire, tenant en main la version française du manuel Sphère, s’est levée et s’est écriée : « Dites, il y a ici un certain nombre de directives. Elles existent et de nombreuses organisations devraient les utiliser pour que nous puissions faire ici du bon travail. Elles sont applicables, a-t-elle poursuivi, à la situation que nous connaissons en matière d’abris, d’eau et d’assainissement et d’hygiène… » J’ai été très touché par son plaidoyer enflammé pour que le manuel Sphère soit utilisé là où il a vraiment sa place.

Je crois qu’il y a de bonnes perspectives pour le Projet Sphère et son manuel. Toutefois, pour ce qui est des standards humanitaires, j’espère que nous pourrons arriver à quelque chose de plus complet dans les cinq à dix prochaines années. Il serait peut-être utile d’aller vers un manuel de la qualité et de la redevabilité qui reprendrait la plupart des standards, sinon tous, applicables à l’action humanitaire. Je veux dire par là, les standards Sphère ainsi que d’autres standards provenant d’initiatives comme le Partenariat pour la redevabilité humanitaire, People in Aid et d’autres encore. Cela encouragerait les organisations préoccupées par les questions de qualité et de redevabilité à travailler ensemble. Ce changement prendra naturellement du temps, mais en tout cas, il devrait se produire dans un délai, disons, de trois à sept ans.

Je pense qu’il est largement possible d’améliorer la collaboration entre les différentes initiatives relatives à la qualité et à la redevabilité au niveau des opérations sur le terrain lors des interventions d’urgence. Je crois aussi qu’il faut examiner comment on pourrait harmoniser les différentes visions stratégiques qui fondent ces initiatives et voir quels éléments de ces stratégies, le cas échéant, ne sont pas négociables.

Enfin, il faudra s’intéresser à toute la question de la structure et de la gouvernance. Il me semble que cette dernière doit être la phase ultime vers l’harmonisation et la convergence ‒ évolution qui doit viser à renforcer les initiatives sur la qualité et la redevabilité, afin qu’elles puissent se faire entendre d’une voix forte dans le secteur humanitaire.

Dans les années 70, jeune étudiant en géographie et en sciences économiques, j’ai parcouru l’Inde et j’y ai vu une pauvreté incroyable. De retour dans mon riche pays, les Pays-Bas, je me suis dit : « C’est ça que je veux faire. Je veux essayer d’aider tous ceux qui non seulement sont les moins nantis, mais sont aussi souvent considérés comme ne faisant même pas partie de la société et sont complètement livrés à eux-mêmes. »

J’ai donc commencé à travailler dans le domaine du développement, puis, plus tard, je me suis intéressé à la préparation aux situations d’urgence et à l’action humanitaire. Je trouve très gratifiant de pouvoir apporter une contribution réelle dans ce domaine. Je dois cependant dire qu’après 35 ans, j’aurais souhaité voir davantage de changements structurels dans le monde. Quoi qu’il en soit, je pense que ce qui importe est de travailler avec passion et engagement pour un monde meilleur.

C’est ce qui m’a toujours animé. Qu’il s’agisse de mon travail à World Vision, comme aujourd’hui, ou au sein du Conseil d’administration Sphère, j’espère contribuer à rendre le monde où nous vivons meilleur et plus sûr pour tous.